L’impopularité des syndicats

Le sondage publié dans le Journal de Montréal d’hier dévoile des données qui ne me surprennent absolument pas, spécialement la donnée où 54,4% des travailleurs syndiqués préféreraient ne pas être syndiqués s’ils en avaient le choix.

Du temps où j’étais vice-président puis président d’une section locale de 400 à 1000 membres, notre exécutif en était arrivé à la même conclusion et je parle des années 80-90. Nous avions une seule assemblée statutaire par année et encore là nous avions peine à intéresser plus du quart de nos membres. Pour les attirer, nous devions offrir le buffet et tirer au sort quelques prix en argent.

La formule Rand obligeait un travailleur d’une unité syndiquée d’en faire obligatoirement partie. Lorsqu’on leur posait les mêmes questions que le sondage, nous obtenions les mêmes réponses. Les élections se faisaient régulièrement par acclamation, faute de volontaires. Personne ne se pressait aux portes pour poser sa candidature.

Pourtant, nous avions gagnés de belles et grandes batailles, obtenus des gains monétaires substantiels et mon syndicat avait une approche plus partenariale que conflictuelle avec l’employeur. Nous avons même remporté une éclatante victoire, jusqu’en Cour suprême sur le lieu de résidence des employés, qui fait jurisprudence aujourd’hui. Une bataille de plus de 10 ans. Notre affiliation à un grand syndicat pancanadien nous a largement permis de supporter financièrement notre action pour gagner cette bataille impossible, à l’origine.

Malgré tout ça, nous essuyions les critiques de nos membres. Nous avions beau leur démontrer notre force collective, ça ne passait pas. Les grandes batailles de la révolution tranquille sont reléguées aux oubliettes et les nouveaux employés du temps arrivaient avec d’excellentes conditions de travail enviées par les employés qui ne pouvaient compter sur un syndicat. Quant on arrive dans un travail régit par une convention collective généreuse, on ne se rend pas compte de l’acharnement des hommes et femmes d’hier à réclamer et obtenir des conditions d’emplois décentes. Ils arrivent tout rôti dans le bec et n’ont pas le goût de revendiquer. Nous vivons dans un monde individualiste, sans vision collective.

La vie comme les modes ou les tendances, obéissent à des cycles et avec les acquis qui disparaissent lentement, d’autres auront à refaire le même travail que nos prédécesseurs. Depuis longtemps, on cherche abolir cette formule Rand et, quant à moi, c’est une erreur. Si ça devient réalité un jour, il faudra renforcir les normes minimales de travail et faire en sorte que le libre choix d’appartenir à un syndicat ne crée pas deux classes de salariés. Ils devront recevoir le même traitement que les syndiqués d’une même boîte et les mêmes avantages d’une convention négociée. La différence sera de défrayer personnellement les coûts d’une défense de grief ou de différent. Ils comprendront alors, l’avantage d’une force collective, pour lutter à armes égales avec l’employeur.

Les syndicats sont nés d’abus éhontés d’employeurs véreux. Des syndicats ont exagérés leurs pouvoirs et même aujourd’hui, c’est encore vrai. Mais les contraires existent et dans ces entreprises, il est possible d’avoir des relations de travail harmonieuses et respectueuses. C’est ce genre de syndicalisme que j’ai vécu et vanté, durant 13 ans et j’en suis très fier.

Maintenant retraité, je m’intéresse encore au mouvement syndical, à distance, et ce que j’entends est resté comme à mon époque. Ils seront toujours impopulaires, jusqu’au jour où leurs membres devront regagner leurs acquis perdus au fil du temps. Réinventer la roue quoi !

Un commentaire sur “L’impopularité des syndicats

  1. Il y a des groupes syndicales sans histoire mais ils ne font jamais la une des médias. Mais il faut admettre que les grosses centrales syndicales ne pensent qu’en fonction de l’argent et sont déconnectés de la réalité où la concurrence mondiale joue un grand rôle dans les coûts d’une entreprise. Ces syndicats n’ont pas su s’adapter aux changements que l’ère de l’informatique a apportés. Ils pensent encore comme dans les années 70 où tout était à faire. Ils ne sont plus crédibles. Par contre, tu as raison sur le fait que les jeunes font leur entrée au marché du travail sur un tapis rouge. Il ne sont pas conscient de la qualité de vie que nous leurs avons donnée. Mais c’est comme pour le droit du français au Québec, pour eux c’est banal puisqu’il n’ont jamais connu pire.
    La vie est une roue qui tourne, nos générations à venir auront leurs batailles comme nous avons eu les nôtres. À chacun son époque…
    À la r’voyure…

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