Un pan de notre histoire : L’Hôtel Tadoussac et les « Bateaux blancs »

Histoire

Au cours du XIXe siècle et pendant la première moitié du XXe, les majestueux paysages de plusieurs régions du Québec longeant le fleuve Saint-Laurent commencent à être vendus via des publicités dans le but d’attirer les touristes, notamment américains

« Laissez-vous submerger par les beautés de la nature tout en profitant d’installations de luxe à bord d’un bateau de croisière ! » C’est sur l’eau qu’on admire le Québec et ces croisières amènent quant à elles le développement des lieux de villégiatures. L’Hôtel Tadoussac est un des dignes représentants de cette histoire.

Hôtel Tadoussac vers 1905

LA NATURE C’EST LA SANTÉ

L’intérêt pour les bords de mer, de grand cours d’eau et pour la nature loin des grands centres urbains est lié entre autres à l’industrialisation et à ses conséquences sur les grandes villes.

Les usines et leur utilisation du charbon pour les machines à vapeur rendent parfois l’air irrespirable et les gens des classes aisées cherchent alors à fuir la ville, surtout l’été.

Cette tendance est jumelée à de nouvelles recherches médicales en Angleterre, qui associent de plus en plus l’air marin à une meilleure santé et les médecins commencent de plus en plus à prescrire des escapades près de la mer pour aider à soigner des maladies comme la tuberculose, mais aussi la dépression. On recommande même de boire de l’eau de mer.

Les gens des classes aisées commencent ainsi à quitter les villes l’été pour profiter du bord de l’eau et des plages. Des zones qui, avant le XIXe siècle, n’ont jamais été adaptées pour la villégiature !

Grands hôtels, promenades aménagées et éclairées et lieux de plaisance commencent ainsi à émerger un peu partout en Europe et en Amérique du Nord, changeant graduellement le paysage de certains grands espaces.

CANADA STEAMSHIP LINES ET LE TOURISME DE VILLÉGIATURE

Le Québec regorge de cours d’eau et de paysages magnifiques et cette tendance des gens des classes aisées à vouloir en profiter, dans un certain luxe, se déplace également dans la Belle Province. Quoi de mieux qu’une croisière sur le fleuve Saint-Laurent pour pouvoir admirer les différentes régions et leur panorama ?

L’homme d’affaire John Molson voit le potentiel de ce type de produit et achète un bateau de croisière à vapeur nommé l’Accommodation, qui permet à de riches touristes américains de découvrir le fleuve à partir de 1809.

Si au départ ce navire fait surtout le trajet entre Québec et Montréal, graduellement, de nouveaux bateaux transportent des touristes vers les natures plus sauvages de Charlevoix, de Kamouraska, du majestueux fjord du Saguenay et même sur la rivière des Outaouais.

À partir de 1840, on voit régulièrement ces « bateaux blancs », qui transportent des touristes aisés, circuler sur le fleuve.

Le développement de l’industrie touristique s’amorce, les compagnies de navigation sont en croissance avec de plus en plus de navires, mais c’est véritablement avec Canada Steamship Lines que l’industrie prend son envol et contribue à la mise en place d’infrastructures de villégiature.

Cette compagnie nait d’une fusion entre plusieurs compagnies, dont la Richelieu and Ontario Navigation Company, en 1913. C’est le début de la grande époque du tourisme de villégiature estival et la clientèle fortunée s’attend non seulement à des navires de luxe, mais aussi à des hôtels qui répondent à ses attentes lorsqu’on fait escale quelques jours !

L’HÔTEL TADOUSSAC, SYMBOLE DU TOURISME DE LUXE

Dans cet univers touristique, l’Hôtel Tadoussac est déjà reconnu pour être situé dans un endroit idyllique dont la paysage et la faune marine ravissent les touristes.

Construit dans les années 1860 et inauguré en 1864, il est en effet très prisé des visiteurs de la région en période estivale. Le fait que le prince de Galles se soit arrêté dans le secteur à cette époque n’est pas étranger à la réputation des lieux, moussée de plus à partir de 1872 par la construction d’une résidence d’été tout près de l’hôtel pour le gouverneur général du Canada, Lord Dufferin.

L’hôtel est si populaire qu’on le fait agrandir deux fois après son inauguration, les plus importantes rénovations ayant cours en 1888. S’il a longtemps été l’archétype même du grand hôtel de villégiature, il a de la compétition par la suite, avec entre autres le Manoir Richelieu.

Devenu vétuste, l’Hôtel Tadoussac est détruit en 1940 et reconstruit en 1942 par William Hugh Coverdale, alors président de Canada Steamship Lines. C’est cet hôtel que vous pouvez encore admirer aujourd’hui, qui a gardé son aura de grandeur !

Source : Évelyne Ferron, historienne, Journal de Montréal, cahier Weekend, 17 août 2024, p70


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