Mon père; mon modèle, mon héros

Loin dans mes souvenirs, je vois mon père au volant de sa grosse bagnole 1947 et nous faisons route vers Montréal-Sud, ma mère, ma sœur, mon frère et moi. Fidèle à son habitude, lorsque nous franchisons les panneaux de signalisation des voies, sur le pont Jacques-Cartier, il nous demande de baisser la tête pour ne pas accrocher les panneaux. Et nous, dans notre caboche d’enfant, on s’exécute, le croyant dur comme fer. À cette époque, le péage était de mise sur ce pont et j’étais toujours excité d’y circuler parce qu’il y avait souvent des accidents et moi, j’aimais ça voir des accidents. Finalement, avant d’atteindre la maison des grands-parents, il laisse son silencieux sur la chaussée en traversant la voie ferrée.

Je me rappelle aussi, lorsqu’il était chauffeur d’autobus à la Commission de transport de Montréal, j’avais 5 ans et son circuit passait juste au coin de chez-nous. Comme ma mère lui préparait son lunch, elle venait me conduire à l’arrêt et je faisais la tournée avec lui, jusqu’au bout de l’île comme il disait. Imaginez, un tour dans un gros autobus et un arrêt au terminus pour luncher avec lui, c’était tout un événement. Il paraît que j’avais beaucoup de charme auprès de la clientèle féminine et il n’était pas rare que je m’assoyais sur leurs genoux. Je le regardais conduire et je l’admirais. Je voulais moi aussi être un chauffeur d’autobus.

Mon père chez nous, c’était l’autorité. Il commandait le respect, sans jamais nous toucher. Il était imposant et quand il parlait, on écoutait. Si ma mère était plus conciliante et facilement manipulable, lui ne l’était pas. Par contre, c’était un fin renard, surtout les soirs de hockey.

Une fois couchés, ma mère ne voulait pas qu’on se lève pour regarder la télé sur le bord de la porte de chambre. Alors il s’assoyait sur la berceuse de façon à ce qu’on voit la télé, sans que ma mère se rende compte que nos têtes franchissaient l’embrasure de la porte et qu’on pouvait voir la télé.

Mon père était un bourreau de travail. Deux même trois emplois simultanément, ça ne l’effrayait pas. On ne manquait de rien. Malgré tout cela, il était disponible pour nous dépanner ou nous conduire ici et là. Ma petite sœur Josée pourrait vous en parler longtemps. Étant le bébé de la famille elle en a beaucoup bénéficié. Vous aviez besoin d’un service ? Il pouvait vous le rendre. Il connaissait tout ! La mécanique, réparer un grille-pain, la pêche, les courses de chevaux, les autos. Bref, si j’avais eu à choisir un père, c’est lui que j’aurais choisi sans hésiter.

Il nous a laissé de belles valeurs; celles de l’honnêteté, du travail, de la patience, de la persévérance et de la discrétion. Il avait un sens de l’humour si particulier, qu’on ne savait pas s’il blaguait ou pas. Louise, ma conjointe en sait quelque chose.

Si je vous en parle au passé, ce n’est pas parce qu’il n’est plus là, au contraire. Mais aujourd’hui, à l’âge vénérable de 82 ans, il nous honore encore de sa présence. Affaibli par la maladie et l’usure du temps, il se bat férocement pour garder une certaine qualité de vie mais surtout sa dignité. Pour moi il a toujours été et demeurera toujours mon modèle et mon héros. Même si moi aussi, j’avance dans la vie et que je ne suis jamais devenu chauffeur d’autobus, je le revois encore quelque fois, avec mes yeux de tout-petit, comme au temps des tours d’autobus et c’est pour cette raison que je veux lui rendre hommage en ce jour de la fête des pères.

Je t’aime papa !

Un commentaire sur “Mon père; mon modèle, mon héros

  1. Je connais ton père que depuis 36 ans et je l’ai toujours considéré comme un grand homme. J’ai beaucoup de respect pour lui et tu as raison, c’est un héros.
    À la r »voyure….

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