Pourquoi dit-on…? (Partie 10)

La Une

Voici quelques expressions du quotidien, mais qu’en est-il de leur histoire ?

AU DIABLE VAUVERT

Lorsqu’on veut envoyer une personne le plus loin possible, on lui demande d’aller « au diable vauvert ».

Utilisée dès le XVe siècle, cette locution fait référence au château de Vauvert ou Val-Vert, situé dans le quartier Denfert-Rochereau à Paris. Dès le XIe siècle, le site aurait été le théâtre d’actes blasphématoires qui, d’après les croyances populaires, laissaient à penser que le diable habitait les lieux.

C’est le roi Saint-Louis (1214-1270) qui décida de purifier le site en l’offrant à l’ordre des chartreux. Ces moines transformèrent le château en une abbaye, mais la légende a subsisté pour former l’expression « faire le diable de Vauvert » qui signifiait alors « s’agiter comme un diable ».

Avec le temps, celle-ci a donné « aller au diable Vauvert », synonyme d’aller au diable ou s’éloigner. NDLR : au Québec ça s’est transformé en « au diable elvert ».

GROS-JEAN COMME DEVANT

Lorsqu’une personne n’a finalement pas obtenu la réussite (professionnelle, financière…) qu’elle escomptait, on peut dire qu’elle est « Gros-jean comme devant », c’est-à-dire pas plus avancée qu’au départ.

Au Moyen Âge, un « Gros-jean » désignait un personnage de farce qui se faisait toujours duper. Cet homme niais et malchanceux était parfois incapable de comprendre ou de réaliser certaines choses, même en se faisant aider. Malgré les efforts des uns et des autres pour le tirer d’affaire, il restait alors aussi stupide qu’avant, ou « que devant » en vieux français.

L’expression s’est ensuite répandue dans le langage courant, notamment après avoir été popularisée par Jean de La Fontaine dans la fable La laitière et le pot de lait (1678).

VEILLER AU GRAIN

On dit d’une personne qui se tient sur ses gardes qu’elle « veille au grain ».

Cette expression est empruntée au monde maritime où un grain est un coup de vent brutal et court, ou un nuage qui l’annonce.

Un bon marin doit donc être constamment sur ses gardes pour pouvoir réagir rapidement si un grain s’abat sur le navire.

PARLER FRANÇAIS COMME UNE VACHE ESPAGNOLE

Si les Français sont réputés peu doués pour les langues étrangères, il faut croire que l’inverse est également vrai. On dit d’un étranger en difficulté avec la langue de Molière qu’il « parle français comme une vache espagnole ».

L’explication la plus courante de cette étrange association « vache espagnole », datant du XVIIe siècle, viendrait d’un défaut de prononciation.

Derrière la « vache » se cacherait un « Basque », puisque « vasces » ou « vasque » désignait à l’époque Gascon et Basques, réputés pour leur difficulté à s’exprimer en français. On devrait donc dire « parler français comme un Basque espagnol ».

Une autre hypothèse voit en « vache espagnole » la combinaison de termes particulièrement négatifs pour l’époque.

AU PIED DE LA LETTRE

On dit qu’une personne prend les choses « au pied de la lettre » lorsqu’elle ne fait aucune interprétation et qu’elle exécute scrupuleusement les ordres.

Cette expression trouve ses origines au début du XVIe siècle, mais elle a été précédée par « à la lettre » avec le même sens depuis le XIIIe siècle.

« Pied » a ici le sens de « mesure », tel qu’on le trouvait autrefois dans l’expression « mesurer quelque chose au pied de ».

Cette expression serait liée à un passage de la Bible dans lequel « la lettre », l’interprétation littérale des mots, est clairement opposée à l’esprit, le véritable message ou l’intention dissimulé sous les mots.

JOUER LES BONS SAMARITAINS

Déterminée à aider son prochain, une personne altruiste n’hésite jamais à « jouer les bons samaritains ».

Cette expression très ancienne est liée au Nouveau Testament, dans l’Évangile selon Luc (X, 25 à 37), où Jésus s’explique sur l’importance d’aimer son prochain pour obtenir la vie éternelle.

À un médecin qui lui demande « Qui est mon prochain ? », le Christ répond avec la parabole du bon samaritain. Celui-ci est un habitant de la Samarie, une région de l’ancien royaume d’Israël. Il décide d’aider par compassion un juif gravement blessé par des brigands et laissé sur le bord d’un chemin dans le plus complet dénuement. Alors que les Samaritains et les juifs étaient réputés pour se détester à cette époque, il le soigne et lui remet de l’argent.

SE RONGER LES SANGS

Lorsqu’une personne est très inquiète, on dit qu’elle « se ronge les sangs », c’est-à-dire qu’elle se fait beaucoup de soucis.

Cette expression datant du XIXe siècle est une image de l’angoisse.

À cette époque, les « sangs » au pluriel, désignaient à la fois l’hémoglobine claire qui circule dans les artères, mais aussi la plus foncée, qui est dans les veines. Dans le langage populaire, ces « deux sangs » combinés faisaient référence au corps humain tout entier.

Le verbe « ronger » est quant à lui né de l’image qu’une préoccupation peut parfois être si forte qu’elle provoque une boule dans le ventre qui rongerait l’intérieur. Cette métaphore a donné naissance à des expressions synonymes : « se faire de la bile » (liquide amer sécrété par le foie) ou « se faire du mauvais sang ».

UN BOUT EN TRAIN

On dit d’un individu qui ne se fait pas prier pour une bonne blague salace (sexuelle), qu’il est un « bout en train ».

Certains de ceux qui connaissent bien un des sens anciens du verbe « bouter », c’est-à-dire -mettre- (« bouter le feu ») et qui aurait l’esprit mal tourné pourraient tout de suite imaginer que notre homme est un spécialiste des parties fines dans un wagon.

Si, effectivement, « boute » vient bien du verbe « bouter » avec le sens de « mettre », le « en train » n’a rien à voir avec la signification actuelle.

En effet, au XVIIe siècle, « en train » voulait dire « en action, en mouvement » et « mettre en train », c’était « préparer à agir » ou « stimuler ». À la même époque, « être en train » signifiait aussi « être dans de bonnes dispositions physiques ou psychiques ».

MI-FIGUE MI-RAISIN

Lorsqu’un individu a un avis mitigé sur quelque chose, il peut la définir comme « mi-figue mi-raisin », c’est-à-dire aussi bonne que mauvaise.

Cette expression, née au début du Moyen Âge, est issue de la popularité des deux fruits. À l’époque, le raisin était considéré comme un mets raffiné et donc très apprécié, contrairement à la figue. Celle-ci était autrefois très courante et bon marché, et sa forme était souvent comparée à celle d’un excrément.

Il arrivait également que les marchands corinthiens (Grèce) ajoutent des morceaux de figues, lourds et peu chers, dans les raisins secs qu’ils vendaient afin de duper les clients.

Dire qu’une situation ou un comportement est « mi-figue mi-raisin » signifiait donc qu’il était aussi vertueux que détestable.

Voici qui met fin à cette série d’expressions françaises dont plusieurs datent de plus de mille ans, et qui sont encore d’usage dans notre quotidien.


12 septembre 2021

Pensée et citation du jour

Faites confiance à votre instinct. Il vaut mieux que vos erreurs soient vraiment les vôtres plutôt que celles de quelqu’un d’autre.

Billy Wilder


Ça s’est passé un 12 septembre…

(1957) Le Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord (NORAD) débute ses opérations.

(1988) L’ouragan Gilbert, l’un des plus puissants du siècle, s’abat sur la Jamaïque soufflant à 320 km/h. Il fera plus de 300 morts et 800 000 sans-abris autour du Golfe du Mexique.

(2011) Inauguration de la chaîne TVA Sport.


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