Un pan de notre histoire : Le temps des sucres au Québec 

La Une

Une tradition vieille de plusieurs centaines d’années

Tant pour les Premières nations que pour les colons, la coulée de sève suscite la fête. Une fois les érables entaillés, il faut procéder à la récolte de la sève, rassemblent des membres de la famille et répondant à l’appel des gourmands.

L’importance de la production des produits de l’érable lui a vali d’être, dans un premier temps, reconnue comme un événement d’importance historique pancanadien et, dans un second mouvement, d’être désignée comme élément du patrimoine immatériel des Québécois.

Les récits des voyageurs comme ceux des missionnaires témoignent des usages des Autochtones et de leur relation à la sève. C’est la transformation de la sève en sucre qui aura périodiquement retenu l’attention de plusieurs historiens : qui des Français ou des Autochtones peuvent en revendiquer la découverte ?

UNE FAUSSE CONTROVERSE

Le récollet Chrestien Le Clercq publie en 1691 la première description de transformation de l’eau en sucre d’érable sur le continent nord-américain par les Mi’kmaq de la Gaspésie. En la faisant bouillir dans des bacs ou des auges en bois, ils obtiennent un sirop qui durcit – à peu près comme le sucre – et prend une couleur rougeâtre.

Que les Autochtones aient eu recours à la technique de l’ébullition ou à celle de la réduction par le froid, technique attestée par quelques Européens – en cassant la glace qui se forme sur le dessus de la sève contenu dans l’auge – le résultat est le même, à savoir un liquide qui épaissit et finit par durcir.

Sa coloration est cependant différente de celle obtenue par ébullition soutenue au moyen de chaudrons métalliques dans les plantations de canne à sucre.

Or, les Français investissent massivement au cours du XVIIe siècle dans les colonies sucrières antillaises et développent une expertise dans la fabrication de sucre de canne : ils en tirent un sucre raffiné de couleur blanchâtre, outre toutes les autres variantes de produits sucrés.

Pour les Français et les colons, le blanc représente la pureté et devient la couleur recherchée, tant pour le sucre que pour le pain.

Dès lors, au début du XVIIIe siècle sous la plume des jésuites Lafitau et Charlevoix, les « Français travaillaient mieux [le sucre] », ou les Abénaquis « ne savaient pas former le sucre comme nous leur avons appris à le faire ».

LA CONSOMMATION

Aux XVIIe et XVIIIe siècles, on en consomme peu en France et ici. Dans l’univers français, le sucre est d’abord et avant tout associé à la pharmacopée. Il sert surtout à soulager les rhumes et la toux.

Dans son Histoire du sucre d’érable, le médecin Jean-François Gaultier indique que la colonie ne produit, vers 1745, que de 6000 à 7500 kilos pour quelque 50 000 habitants, soit au maximum 150 g par personne, adultes et enfants confondus.

En associant sucre d’érable et sucre de canne, on obtient vers 1750 une consommation, variant entre 500 g et 750 g par personne. À la fin du XVIIIe siècle, malgré le fait que les Français contrôlent le commerce sucrier en Europe, ils n’en consomment que 1,22 kg par personne, chiffre très similaire à celui qu’on obtient pour la colonie.

Par contre, en Angleterre, il s’agit d’une histoire différente : si en 1700, la consommation atteint déjà 2 kg par personne, en 1792, cette consommation représente 6,7 kg par individu, soit plus de cinq fois la consommation d’un francophone de ce côté de l’Atlantique ou d’outre-Manche.

La Cuisinière Canadienne, premier livre de recette francophone publié au Canada en 1840, ne propose que trois recettes faisant spécifiquement référence soit au sirop, soit au sucre d’érable.

LE GOÛT DU SUCRE D’ÉRABLE

À compter des années 1850, le goût du sucre s’implante autant en France qu’au Québec. En 1844, le Québec produit 1 272 465 lb de sucre d’érable pour une population de 697 084 personnes, soit une production de 1,48 kg par personne.

Sept ans plus tard, la production de sucre d’érable se chiffre à 6 057 532 lb de sucre pour une population de 890 261 personnes, soit 3,08 kg par personne, une augmentation de plus de 100 % en sept ans à peine.

Il faut toutefois rappeler que la population anglophone – dont le goût pour le sucre est prononcé – compte pour 14 % de la population. Même la compagnie Redpath, installée sur les rives du canal Lachine durant les années 1850, se met à fabriquer du sucre d’érable.

UN CHANGEMENT DE PRODUCTION

Cinquante ans plus tard, en 1901, le sucre d’érable trône toujours au sommet de la production acéricole, le Québec produisant 13 564 819 lb de sucre, mais en baisse substantielle par rapport aux chiffres de 1881 et 1891. Plus le XXe siècle progresse, plus les agriculteurs québécois délaissent la production de sucre, suivant en cela la voie tracée par les acériculteurs de l’Ontario.

Si les chiffres de production de sirop pour 1901 sont inconnus, ceux des recensements subséquents ne laissent aucun doute : en 1911, il se produit près d’une fois et demie plus de sirop que de sucre. L’écart ne fera que s’accentuer par la suite, atteignant près de 14 fois plus de sirop en 1951. En 1970, l’écart se chiffre presque à 50 fois plus de sirop.

Le virage de production vers le sirop coïncide avec la prise de conscience que suscite, dans un premier temps, le fabricant d’évaporateur John H. Grimm. Ses propos agacent le ministre de l’Agriculture J. E. Caron, qui pose un regard sévère sur la qualité du produit et la technologie utilisée.

Ces deux propagandistes réagissent au déclin des prix et à la falsification des produits, notamment l’apparition des fameux « sirops de poteau ». Au début des années 1920, le marché du sucre d’érable stagne toujours et connaît une crise majeure.

La société coopérative agricole Les producteurs de sirop d’érable du Québec est incorporée en 1925 à la suite de l’incitation du ministre Caron. Deux ans plus tard, la marque Citadelle voit le jour et l’usine de Plessisville est construite.

Entre-temps, les producteurs québécois ont choisi la voix du sirop, ce dernier coûtant moins à produire tout en rapportant davantage. Ce changement est facilité par deux facteurs : la réfrigération et la technologie des évaporateurs

Source : Yvon Desloges, Historien, Journal de Montréal, cahier Weekend, 15 avril 2023, p77


114e jour de l’année

Lundi, 24 avril 2023


À la douce mémoire de…

DICK RIVERS 1945-2019 – Chanteur rock français.


Pensée et citation du jour

Le respect, l’admiration et l’amour sont de meilleurs moteurs que le stress, la sanction ou l’incompréhension.

Olivier Sax


Ça s’est passé un 24 avril…

(1934) L’orgue Hammond est un instrument électromécanique inventé en 1934 par Laurens Hammond. Il s’inspire de l’orgue traditionnel et était initialement destiné à équiper des églises n’ayant pas la place ou les moyens financiers pour disposer d’un orgue à tuyaux.

(2007) Le constructeur automobile Toyota accède au premier rang des constructeurs automobile au monde. Durant le premier trimestre 2007, Toyota a vendu 2 348 millions de véhicules tandis que son concurrent américain General Motors a vendu 2260 véhicules.

(2013) L’effondrement du Rana Plaza est l’effondrement d’un immeuble à Savar, faubourg ouest de Dacca, la capitale du Bangladesh, parfois appelé « catastrophe de Dacca » par les médias, le 24 avril 2013, a provoqué au moins 1127 morts pour environ 2 500 rescapés (bilan au 13 mai 2013). Les sources ultérieures parlent de 1135 morts.


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